Nous fêtons cette année les 60 ans de l’invention de la cellule solaire. Depuis 1954, le photovoltaïque a bien évolué ; les avancées technologiques et l’économie d’échelle ont permis de rendre cette source d’énergie de plus en plus compétitive, comme nous l’avions vu précédemment.
Aujourd’hui, les réserves pouvant être émises quant à l’insertion massive du photovoltaïque dans le mix énergétique sont les suivantes :
- L’énergie solaire – tout comme l’énergie éolienne – est intermittente, et peu ou pas pilotable du fait de sa dépendance aux conditions météorologiques.
- La production se fait de manière décentralisée sur l’ensemble du territoire, ce qui constitue un changement par rapport aux centrales d’énergies fossiles.
De nombreuses institutions et sociétés réfléchissent actuellement à des scénarios globaux de transition énergétique, visant à promouvoir l’utilisation du photovoltaïque et de l’éolien – ces technologies renouvelables étant reconnues comme celles ayant le potentiel le plus élevé. Voyons en quoi ces scénarios permettent d’être optimistes quant à une large intégration de ces énergies dites intermittentes.
Variabilité, intermittence et prévision
L’énergie solaire est intermittente, mais ses fluctuations sont prévisibles, en ce qu’elles dépendent de cycles et de phénomènes naturels. De plus, la prévision de la production d’énergie photovoltaïque à différents horizons temporels (horaire, journalier) permet aujourd’hui d’obtenir une bonne précision. Il est alors possible pour le producteur de prévoir sa production solaire à l’avance et d’en informer le gestionnaire de réseau, qui pourra alors planifier précisément les besoins en sources d’appoint. La sécurité et la fiabilité du réseau sont ainsi préservées.
A ceux qui se demandent si le gestionnaire de réseau est en mesure de s’adapter à la variabilité de la production, on peut faire remarquer que les sources d’énergie traditionnelles ont aussi leurs hauts et leurs bas. Ainsi, une centrale nucléaire est en état de fonctionnement 83% du temps en moyenne pendant l’année, sa durée d’inactivité étant due principalement à des opérations de maintenance – programmées ou non. Les chiffres sont de 86 % d’état de service pour une centrale au gaz, et 88% pour une centrale au charbon. Les opérateurs du réseau ont mis en place des mécanismes pour réagir face à ces carences de production, appelés services systèmes et mécanisme d’ajustement.
Mix énergétique et foisonnement
La production d’énergie photovoltaïque subit des fortes variations journalières (l’intensité du rayonnement suit la course du Soleil) et saisonnières (l’intensité du rayonnement est plus forte en été qu’en hiver), et dépend en plus des conditions climatiques (de la couche nuageuse principalement). Un système photovoltaïque produira selon les conditions entre 5% et 100% de sa puissance crête en journée. Sachant cela, on comprend l’intérêt de coupler les énergies éolienne et solaire ; de manière générale le vent souffle quand il y a peu de soleil, et inversement.
Le graphe ci-dessus représente la production et la consommation pour une semaine type en Allemagne en 2022, selon un scénario dans lequel les énergies renouvelables constituent une part importante du mix énergétique. Le mardi et le jeudi correspondent à des journées ensoleillées et venteuses, où la production photovoltaïque et éolienne couvre l’ensemble de la demande d’électricité. Le reste du temps, des combustibles fossiles sont utilisés pour faire l’appoint.*
De même, bien qu’elles imposent des coûts d’exploitation plus élevés et donc une rentabilité inférieure, les installations de biomasse ou de cogénération permettent de répondre quasi instantanément à la demande. On comprend là tout l’intérêt d’assurer un mix entre des sources d’énergie variées.
A l’échelle d’un pays intervient aussi un phénomène de foisonnement des points de production ; le cumul de la production venant de multiples sources éloignées fluctue moins que chaque source prise indépendamment. Le travail sur les interconnexions entre réseaux nationaux à l’échelle européenne, en cours de réalisation, permet de renforcer les échanges d’électricité, stabilisant par la même occasion les prix sur le marché.
Le graphe ci-dessus illustre l’intérêt de la mise en place d’interconnexions pour « lisser » la demande. Un même effet de lissage a lieu pour la production grâce au foisonnement.*
Vers plus d’efficacité énergétique
Cependant, le mix énergétique doit être accompagné d’une meilleure utilisation de l’énergie du côté des consommateurs également. Grâce à l’efficacité énergétique, et par la seule mise en place de mesures incitatives, de sérieux progrès peuvent être faits. Cela permet de réduire les coûts globaux du système : moins d’investissements dans de nouvelles centrales, moins d’électricité à transporter, moins d’écarts à gérer. En somme, le kilowattheure le plus rentable est celui qu’on économise.
L’efficacité énergétique est un défi important pour les politiques publiques. D’ici à 2050, la demande mondiale d’énergie devrait doubler. Dans le même temps, il est crucial de réduire les émissions de CO2 afin de limiter le réchauffement climatique. Pour ce faire, il faut parvenir à améliorer la productivité énergétique (unité de PIB par unité d’énergie consommée), c’est-à-dire décorréler la consommation énergétique de la croissance économique.
Conclusion
D’innovation en innovation, de politique en politique, l’avenir du système énergétique se précise petit à petit, et les énergies renouvelables en sont un élément clé. Des scénarios très différents sont imaginés, mais il semble certain qu’à l’avenir on ne se passera plus de la considérable ressource énergétique qu’offre le Soleil. Les évolutions technologiques du domaine permettront de mieux la comprendre, la prévoir et la dompter.
*Source des illustrations : http://www.agora-energiewende.org/